En 1999, l’Onu a fait du 25 novembre la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Malheureusement, ces violences persistent, l’événement perdure ainsi depuis plus de deux décennies. À Port de Bouc, un rassemblement devant la mairie et des prises de paroles de VIE au féminin, du maire et de la conseillère départementale sont prévues, suivies d’un jeté de fleurs du pont Van Gogh. Présidente de l’association citée, Marie-France Nunez explique la pertinence et l’importance d’une telle journée.
Le 25 novembre est la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Pourquoi est-il important que des dates soient associées à des luttes ?
Marie-France Nunez : Quand on parle de violences, on a tendance à spontanément penser aux violences physiques. Elles prennent en réalité diverses formes. Dans le monde du travail elles sont économiques puisque les femmes sont moins bien rémunérées, et psychologiques quand elles sont victimes de harcèlement. Le fait qu’une partie de la population soit moins bien payée et ait de moins bonnes retraites, ça se traduit évidemment dans le couple et dans les rapports entre hommes et femmes.
Une journée comme celle du 25 novembre permet de donner une visibilité à tout cela. Par ailleurs, on est déjà à plus de cent victimes de violences sexistes et sexuelles (VSS) depuis le début de l’année, et ce, sans compter les suicides qui découlent des violences.
Cette journée est aussi un hommage dans le sens où elle permet de se rappeler des victimes ?
M-F.N : Tout à fait, on a besoin de cette visibilité pour les victimes, pour les familles brisées, pour les enfants témoins… Ils ont besoin d’aide car ils sont malheureusement traumatisés.
Sur le site du Gouvernement, il est écrit que la journée du 25 novembre existe car la violence contre les femmes est une violation des droits de l’Homme ; qu’elle résulte d’une discrimination persistante à l’égard des femmes ; qu’elle a de lourdes conséquences et peut empêcher la réalisation de progrès dans certains domaines ; qu’elle n’est pas inéluctable ; qu’elle est un problème mondial. Qu’en pensez-vous ?
M-F.N : C’est vrai. C’est bien de le dire, maintenant il faudrait que les actes concordent. On pleure tous les jours pour la cause des femmes mais les choix politiques sont aberrants. Le 3919, numéro d’urgence a par exemple failli disparaître… Nous, associations féministes, manquons de moyens financiers mais aussi physiques. Il n’y a notamment pas assez d’hébergements d’urgence. Il existe aussi un manque de moyens concernant les hommes violents : aucun suivi n’est réalisé. Lorsqu’il y a condamnation, un homme reconnu coupable de VSS doit être suivi psychologiquement. Mais, faute de moyens, cela n’est pas toujours le cas.
Il y a eu une évolution, tardive mais intéressante, à savoir une circulaire de 2014. Celle-ci permet aux procureur.e.s de poursuivre l’agresseur présumé en l’absence de plainte. Cela est nécessaire car il est fréquent que les femmes qui ont porté plainte pour violences conjugales retirent finalement leur plainte.
Je souligne par ailleurs que nous agissons localement. Tout comme Magali Giorgetti aujourd’hui, Evelyne Santoru-Joly, notre ancienne conseillère départementale, s’est fortement investie dans la défense et la protection des femmes victimes de violences par la Maison des femmes Delphine Giovannini.
Vous évoquez le suivi des hommes violents, est-ce primordial ?
M-F.N : C’est effectivement nécessaire. On ne naît pas violent, on le devient. J’insiste sur la nécessité d’accompagner ces hommes : si certains parviennent à se soustraire aux soins psychologiques qu’ils doivent recevoir, c’est bien parce qu’il y a un manque de moyens, parce que l’État se désengage. Il le fait d’ailleurs d’une manière globale, les associations comme VIE au féminin prennent le relais.
Comment on lutte contre ce fléau, terriblement ancré dans notre société ?
M-F.N : Le vocabulaire est important, l’entrée du mot féminicide dans le langage commun est une avancée. Ensuite, il y a bien sûr la prévention. Je remercie à ce titre les différentes structures port de boucaines qui sont toujours partantes pour cela. Le Méliès a organisé jeudi 10 novembre un échange sur les effets de la violence conjugale. La culture est un biais assez efficace pour toucher un public large, parce qu’elle est diverse et riche, elle intéresse toujours. Je pense au théâtre forum qui a fait ses preuves grâce à son côté interactif. On en a organisé avec Antinea Lestien, du collectif « rÉGALons-nous ! », durant lesquels on a vu des élèves se lever et dire : « Ah non, dans cette situation, on ne parle pas comme ça ! »
Ensuite, les politiques ont un pouvoir d’action. Pierre Dharréville, le député de notre circonscription, est à ce sujet très actif. Il a proposé une loi pour lutter contre la précarité des familles monoparentales, dont la grande majorité concerne les femmes ; et une autre pour lutter contre les violences au sein du mariage.
La prévention est-elle notamment utile envers un public jeune ?
M-F.N : Ils et elles sont plus réceptif.ve.s. On organise d’ailleurs six sessions d’atelier de sensibilisation auprès de lycéen.ne.s et élèves de CFA en novembre. Le thème est le cyberharcèlement.
Le 25 novembre, la Ville se joint à cette journée internationale, comme chaque année. Cela prouve son engagement contre toutes formes de discrimination…
M-F.N : Port de Bouc est une ville d’engagement. Nous avons une élue dédiée à l’égalité, ce n’est pas rien et peu commun. La commune n’a d’ailleurs pas attendu que la parité soit inscrite dans la loi pour la pratiquer au sein du conseil municipal. La Ville est aussi signataire d’une charte européenne pour l’égalité. Elle forme ses élus et ses agents à l’égalité au travail. Elle participe à l’évolution des mentalités à son échelle et c’est important !
INFOS
Rassemblement devant la mairie à 12h vendredi 25 novembre.
Du 25 novembre (l'inauguration a lieu à 18h, en présence du maire et de la conseillère départementale) au 2 décembre, une exposition réalisée par l’hebdomadaire Clara Magazine et l’association Femmes solidaires est à découvrir à la maison des associations. Celle-ci comporte dix-sept panneaux et revient sur les formes de violences faites aux femmes.